Fatimata et Maryam sont âgées de quinze jours, Hawa est enceinte de 7 mois, toutes survivent au côté de 220 personnes vulnérables, forcées de vivre à la rue depuis des semaines sur les trottoirs de Paris et sa périphérie. Depuis samedi 9 juillet, ces enfants, ces femmes seules, ces couples et ces familles ont décidé de mettre fin à leur errance d’un bout de trottoir à l’autre et ont choisi de s’installer sous un pont à Bagnolet (Seine-Saint-Denis). Une grande partie de ces familles avait pourtant pu obtenir une mise à l’abri d’urgence il y a quelques semaines par la Mairie de Paris, avant d’être remises à la rue dans la foulée par la préfecture.

Chaque soir à partir de 18h sur le parvis de l’hôtel de Ville à Paris, les bénévoles d’Utopia 56 rencontrent des dizaines de familles sans solution d’hébergement. Selon nos capacités, une partie d’entre elles se voit proposer une nuit en hébergement solidaire, pour les autres, nous distribuons du matériel d’urgence et installons ces familles pour passer la nuit en tente. Depuis trois jours, des bénévoles sont présents toute la journée sur le campement pour aider à la logistique et assurer une présence auprès des familles.

Samedi, une manifestation avait lieu devant le centre de premier accueil dédié aux personnes fuyant la guerre en Ukraine. Face à la baisse des arrivées, 75% des 500 places disponibles sont quotidiennement inoccupées, inaccessibles aux non-ukrainiens. C’est suite à cette manifestation que ces familles ont pris la décision de ne plus avoir à subir l’errance quotidienne, et de sédentariser leur installation. Cette errance est le résultat d’un abandon des institutions, d’une pression policière constante et d’un manque cruel de places d’hébergement d’urgence au 115.

Une partie de ces familles s’était déjà mobilisée le 14 juin devant la mairie de Paris. Après avoir déjà passé plusieurs mois à la rue, elles appelaient à l’aide, dans l’espoir d’obtenir une solution d’hébergement. Face au manque de volonté de la préfecture, la mairie avait finalement orienté ces familles dans un gymnase en attendant une solution pérenne.

« Des solutions, il en existe. La France a été en capacité d’accueillir 100 000 personnes fuyant la guerre en Ukraine en 4 mois, aucune d’entre-elles n’a eu à passer une nuit dehors. Ici, espérant en dissuader certaines de s’installer en France, l’État prend la décision de laisser ces personnes dormir dans la rue » Océane Marache, coordinatrice à Utopia 56 Paris

Plusieurs familles avaient finalement été orientées vers des solutions d’hébergement en région par la préfecture d’Île-de-France… pour être remises à la rue avec leurs enfants une semaine plus tard. Sans être prévenues, certaines avaient même été orientées vers des centres de retour volontaires vers leur pays d’origine. Elles survivent aujourd’hui sur le campement de Bagnolet.

Malgré le fait que les préfectures n’aient jamais répondu à nos alertes en cinq ans, nous avons de nouveau contacté la préfecture d’Île-de-France et de Seine-Saint-Denis par e-mail afin de trouver une solution humanitaire, digne et pérenne à ces situations.

Une  grande majorité de ces familles sont originaires d’Afrique de l’Ouest, beaucoup ont vu leur demande d’asile refusée et sont depuis abandonnées par les institutions. Elles appellent à l’aide, et demandent à Emmanuel Macron de considérer leur peine, leur fatigue et leurs droits afin de sortir enfin de la rue et de commencer à reconstruire ici, en France.

 

📸 Christophe Michel