Le 1er novembre dernier marquait le début de la trêve hivernale, les températures baissent et vont bientôt atteindre zéro degré la nuit. Pourtant, chaque soir, devant l’Hôtel de ville de Paris, hommes, femmes et enfants laissés à la rue par manque de solutions d’hébergement rejoignent les permanences d’Utopia 56 et de Médecins du Monde dans l’espoir de bénéficier d’une mise à l’abri d’urgence. Malgré cela, les portes du centre d’accueil « GL center », dédié aux déplacé·es ukrainien·nes et bien souvent à moitié vide, restent fermées pour toute autre nationalité.
Utopia 56 et Médecins du Monde saisissent à nouveau le juge des référés liberté du tribunal administratif de Paris avec le soutien de Me Samy Djemaoun pour demander l’ouverture de ces places à tous·tes.
Depuis le 4 mars 2022, le gouvernement français a déployé un dispositif remarquable pour les déplacé·es Ukrainien·nes. Du premier accueil à la protection temporaire, ce sont plus de 100 000 personnes fuyant l’invasion russe et la guerre qui ont pu, à minima, transiter par la France dignement dont plus de 75 000 qui ont pu s’y installer entre mars et septembre. Si au début de la guerre, la France accueillait durablement plus de 26 000 personnes par mois, ce chiffre a diminué jusqu’à atteindre moins de 4000 personnes en septembre. En conséquence, les centres de premier accueil sont quasiment inoccupés; à l’image du “GL center”, à Porte de la Villette, où en moyenne 120 places sont libres chaque soir. Les équipes d’accueil y sont en sureffectifs et les denrées alimentaires sont même redistribuées à d’autres associations, sinon jetées, car les quantités prévues excèdent systématiquement les besoins réels sur place.
Parallèlement, en l’absence de solutions proposées par l’État ou les départements , des personnes en familles dorment à la rue durant cette période hivernale. Elles ont fui la guerre, les persécutions ou l’extrême pauvreté, elles sont originaires d’Afghanistan, de Côte d’Ivoire, du Maghreb et d’ailleurs :
Entre le 23 octobre et le 23 novembre place de l’Hôtel de Ville à Paris, 733 personnes se sont présentées aux permanences d’Utopia 56 et de Médecins du Monde, parmi elles 281 enfants dont 83 de moins de 3 ans. Chacune vient pour tenter d’avoir accès à un hébergement d’urgence, ou au réseau d’hébergement citoyen mis en place par les associations. Si 70 d’entre elles ont pu parfois accéder temporairement au dispositif du 115, plus de 200 restent condamnées à dormir dehors malgré les conditions climatiques et la présence d’enfants en bas âge, voire trop souvent de nouveaux-nés.
Nous, associations, avons déjà interpellé la préfecture à plusieurs reprises demandant l’ouverture des places laissées libres dans les centres d’accueil pour déplacé·es ukrainien·nes jusqu’à saisir le tribunal administratif en juillet 2022. Le dernier courrier du 21 novembre 2022 adressé au préfet d’Île de France, Monsieur Marc Guillaume, est à ce jour resté sans réponse malgré l’urgence de la situation.
Le 19 octobre dernier, Madame Caubel, secrétaire d’État chargée de l’enfance, et Monsieur Klein, Ministre du logement, promettaient : “plus aucun enfant à la rue cet hiver”. La réalité est pourtant toute autre.
Nous ne pouvons tolérer la mise en danger d’hommes, de femmes et d’enfants alors même que les places existent et qu’un accueil digne est possible pour tous·tes.
C’est pourquoi Utopia 56 et Médecins du Monde saisissent une nouvelle fois le juge des référés liberté pour demander à ce qu’il soit enjoint au préfet de la région Île-de-France et au Ministre de l’Intérieur d’ouvrir les centres d’hébergement d’urgence dédiés aux déplacé·es ukrainien·nes à Paris, à l’ensemble des personnes en situation de très grande précarité, sans distinction de nationalité ou pays d’origine.
L’audience publique aura lieu le vendredi 2 décembre à 14h30, au Tribunal administratif de Paris. Mobilisons-nous afin d’exiger un traitement équitable de tous les exilé.es et que l’accueil digne devienne la règle et non pas l’exception.