Le projet de tiers-lieux d’hébergement d’urgence pour familles, dit « Les Acacias » dans le 17e arrondissement de Paris, va fermer ses portes. L’hiver dernier, les équipes d’Utopia 56 ont ouvert ce lieu, à deux pas de l’Arc de Triomphe, pour répondre aux besoins des familles, couples et femmes seules à la rue à Paris qui sollicitent l’aide d’Utopia 56 chaque soir, place de l’Hôtel de Ville à Paris. C’était un projet éphémère qui a vu le jour grâce au bon vouloir d’un citoyen qui a mis à disposition d’Utopia 56 cet endroit. Il prend fin le 17 juin prochain, soit dans trois jours.
Depuis le 25 novembre 2022, ce lieu a permis d’accueillir chaque soir la quasi-totalité des familles venant solliciter notre aide, ne laissant donc presque aucune famille à la rue à Paris cet hiver. Pendant ces sept mois, nous avons pu fournir 4237 nuitées aux ménages, soit 2155 personnes hébergées durant cette période, sans compter celles qui ont pu accéder aux hébergements solidaires.
« Certes, les conditions n’étaient pas optimales, mais cela a permis à des milliers de personnes de dormir en sécurité dans un lieu où elles se sentaient bien, toujours dans la bonne humeur, l’écoute des personnes et le respect mutuel. C’est déjà énorme. C’est avec un grand pincement au cœur que nous fermons ce lieu de vie. L’État doit prendre exemple sur cet acte citoyen. Des solutions existent.« , explique Augustin Lambilliotte, responsable général du lieu.
Aucune solution de remplacement n’a été trouvée pour poursuivre le projet et à partir du 18 juin, la majorité des familles, environ 120 personnes par soir, que nous rencontrerons resteront sans solution pour la nuit. Une minorité seulement accèdera à notre dizaine d’hébergements solidaires disponibles chaque soir, ce qui est encore trop peu face au nombre de personnes nous sollicitant. Cela représentera 80 à 90 personnes en plus chaque soir à la rue, sans compter celles qui n’ont pas connaissance de l’association et restent sans solution. Parmi elles, des nourrissons, des femmes enceintes, des enfants qui vont à l’école, des adultes qui travaillent. Une majorité de personnes vulnérables contraintes de survivre à la rue.
Des dispositifs d’urgence doivent être mis en place pour que ces ménages n’aient plus à attendre des semaines, voire des mois, une réponse du 115 qui leur donnera une place pour une nuit avant de les remettre dehors. Ce système, dit saturé, depuis des années, doit être actualisé et modernisé, car des solutions existent, la volonté doit suivre. Le gouvernement a prouvé ses capacités d’accueil avec les dispositifs mis en place pour les personnes ukrainiennes qui ont permis d’accueillir dignement près de 100.000 personnes en moins d’un an.
Pour rappel, l’article L345-2-2 du code de l’action sociale et des familles précise que « Toute personne sans abri en situation de détresse médicale, psychique ou sociale a accès, à tout moment, à un dispositif d’hébergement d’urgence« . L’État ne respecte pas la loi et en tant qu’association et citoyens concernés, notre combat est de la faire respecter. Après nos efforts pour pallier les manquements du gouvernement ces dernières années et malgré la fermeture de ce lieu emblématique, nous continuerons à porter la voix des invisibles.
Malgré leur précarité, ce type de projet, comme les réquisitions, sont des réponses citoyennes aux manquements de l’État. Avec 300 000 personnes à la rue (Fondation Abbé Pierre) et 3 millions de logements vacants en France en 2022 (INSEE) , il est nécessaire que les institutions responsables mettent les moyens pour que plus « personne ne soit à la rue », comme le promettait Emmanuel Macron en 2017.
Nous vous invitons à passer sur ce tiers-lieu sur ces derniers jours d’ouverture afin de rendre compte de la solidarité et des moments de vie qui s’y tiennent.