À Toulouse, plusieurs associations (FAS Occitanie, FNSF, MDM, Secours catholique Caritas France, Fondation Abbé Pierre et le DAL 31) dont Utopia 56, représentées par Maître Laspalles, ont déposé une requête auprès du Tribunal administratif.
Cette requête demandait :
- “La suspension de l’exécution de la décision du préfet de la Haute-Garonne créant un nouveau régime juridique de la sortie d’hébergement d’urgence en hôtel, fondé sur la durée de prise en charge, la vulnérabilité des personnes et sur leur situation administrative”.
En effet, depuis mai 2023, 311 ménages, soit 944 personnes dont 439 enfants, ont reçu une lettre de fin de prise en charge à l’hôtel. Parmi elles, 658 personnes dont 311 enfants ont été remis.e.s à la rue sans solutions. Ces décisions de fin de prise en charge ont été prises par la Préfecture de Haute-Garonne sans clarification des critères motivant ces décisions.
Depuis mai, nos équipes vont sur le terrain en maraudes d’urgence à la rencontre de ces familles. Lors de ces maraudes, nous avons pu constater les effets désastreux de ces violentes décisions administratives sur la santé mentale et physique de ces personnes.
Cet été, un collectif de famille a décidé de faire une action de mobilisation en installant un campement dans le parc de Saint Sernin. Cette action était soutenue par Médecins du monde, le DAL 31 et Utopia 56. Très vite expulsés par les forces de l’ordre, nous avons cependant pu rencontrer des représentants de la préfecture, ultérieurement. Leur discours : “nous devons fluidifier l’hébergement d’urgence hôtelier, nous avons une obligation de moyen et donc nous ne pouvons pas héberger tout le monde”.
Aucune solution n’a été proposée suite à cet entretien et les remises à la rue ont continué.
C’est pourquoi nous avons déposé cette requête le 4 octobre.
Cependant, lors de l’audience, nous avons retrouvé le même discours. Encore mieux, Madame la sous-préfète a, sans équivoque possible, prononcé cette phrase : “Ces personnes n’ont pas de solution, la seule solution, c’est qu’ils rentrent chez eux”. Les intentions de la préfecture sont alors très claires : interdire aux personnes sans papiers d’avoir accès à leur droit : un hébergement.
Cette requête a été rejetée par le juge du tribunal administratif. En effet, selon son jugement, le critère d’urgence n’est pas établi. Cette requête ne peut donc être jugée en référé. Cela veut dire que le fond n’a pas été jugé et donc la préfecture n’a pas “gagné”. Cependant, le jugement au fond peut prendre des années.
Aujourd’hui, nous voyons à peu près 10 familles vivant dans la rue par maraude. Il fait actuellement 6 degrés la nuit à Toulouse. Aucun plan hiver a été annoncé par la préfecture de la Haute-Garonne.
Aujourd’hui, des professeur.e.s et des parents d’élèves se mobilisent pour réquisitionner des écoles afin que les familles puissent dormir au chaud.
Depuis la rentrée scolaire 2023-2024, plusieurs syndicats des instituteurs, dont Jamais sans Toit, et des collectifs de parents d’élèves se sont mobilisés pour dénoncer cette situation. Ces remises à la rue poussent alors des enfants scolarisés, à la rue, sans solution. Après avoir dénoncé cette situation insoutenable, sans réponse de la préfecture, les différents collectifs ont réquisitionné plusieurs écoles, pour y loger les familles et les enfants à la rue.
Il nous semble important de lier cette actualité au climat politique actuel. En effet, en ce moment, la loi immigration du ministre Gérald Darmanin est en train d’être votée. En cette nouvelle période de débat législatif sur l’immigration, nous exhortons toutes et tous, à rejeter ces méthodes préfectorales, dangereuses, et déshumanisantes. Qui plus est, des méthodes prouvées, inefficaces, pour reprendre leur vocabulaire. Ils ne cherchent qu’à dégrader un peu plus le quotidien d’enfants, de femmes, d’hommes et de familles vulnérables et précaires.
Le débat se focalise autour d’idéaux nauséabonds et profondément indignes de toutes valeurs républicaines et humaines.
N’ayons pas peur des mots, la loi immigration n’est pas une loi visant à encadrer et intégrer dignement les personnes en exil, mais plutôt la création d’un cadre permettant la chasse et l’errance permanente et systématique des personnes sans-papiers.
On cherche à les chasser des hôpitaux, en détruisant l’AME, ou à défaut en retardant son obtention. Les exclure des logements d’urgence, n’est qu’une de ces méthodes d’intimidation, de violences physiques et psychologiques pensées et réfléchies sciemment pour nuire à des personnes vulnérables et espérer dissuader les personnes de chercher refuge en France.