La préfecture de Haute-Garonne, soutenue par la Métropole et la mairie de Toulouse, a entamé ses démarches de remise à la rue d’un grand nombre de familles, de femmes isolées et/ou victimes de violences, de personnes âgées et d’enfants.

Cela fait deux semaines que les signalements se font de plus en plus nombreux, auprès de toutes les associations. Nous recevons beaucoup de messages d’alertes concernant des personnes à la rue dans des situations extrêmement préoccupantes et dangereuses.

Au 27 juillet 2023, ce sont 166 ménages, soit 371 personnes, dont 136 enfants qui ont reçu une lettre de fin de prise en charge de l’hôtel. Parmi ces personnes, 296 ont été remises à la rue, dont 131 enfants – sans aucune autre proposition de solution. 

Parmi eux, il y a des femmes enceintes de sept mois et plus, des nourrissons de moins d’un an, des personnes âgées malades et en cours de traitement, des femmes victimes de violences et des familles entières. Cette liste non exhaustive témoigne de la violence des choix de la Préfecture de Haute-Garonne.

 

Cette même préfecture préfère bafouer le droit français, européen et international, plutôt que de prendre ses responsabilités politiques et d’assumer la nécessité d’une politique sociale d’accueil décente, inclusive et humaine. Ces services sont censés garantir le minimum de sécurité et de dignité pour les personnes.

Elle aurait dû s’appuyer sur les articles L345-2-2 et L345-2-3 du Code de l’Action Sociale et des Familles, qui disposent de l’inconditionnalité et de la continuité de la prise en charge. Il n’y a aucune limite de séjour sans solution proposée. Toute autre orientation adaptée à la situation de la personne doit être privilégiée à l’accueil en hôtel, cependant, ici à Toulouse, aucun autre type de logement n’est mis à disposition.

Nous souhaitons aussi rappeler que l’État français est signataire de la Convention Internationale des Droits de l’Enfant (CIDE) depuis bientôt 33 ans. Aujourd’hui, à Toulouse, la préfecture et la mairie bafouent l’Article 2, alinéa 1 et 2 ; l’Article 3, alinéa 1,2 et 3 ; l’Article 27, alinéa 1 et 3 ; et l’article 28, alinéa 1c. Ces articles engagent la responsabilité de l’État, dans la préservation et l’entretien du droit supérieur de l’enfant à vivre décemment et à son développement en toute sécurité. 

Enfin, nous aimerions rappeler les différents engagements politiques prononcés, entre autres, par le Président de la République, Emmanuel Macron et l’ancien Ministre délégué de la Ville et du Logement, Olivier Klein : 

  • Je ne veux plus, d’ici à la fin de l’année, avoir des femmes et des hommes dans les rues, dans les bois. Je veux partout des hébergements d’urgence” ; “La première bataille, c’est de loger tout le monde dignement” ; Emmanuel Macron, 27/07/2017, Orléans.
  • Un enfant qui dort à la rue avec sa famille, c’est insupportable […]. J’ai demandé aux préfets d’être extrêmement attentifs aux appels au 115, aux familles… ” Olivier Klein, RTL Matin, 17/11/2022. 

Qu’en est-il de toutes ces déclarations ? 

 

Certaines familles se sont montées en collectif afin d’essayer d’obtenir des réponses et des solutions de la part de la préfecture. Ce collectif avait ainsi décidé d’une première action : installer un campement dans le parc de la Basilique Saint Sernin. Nous les avons accompagnées dans cette démarche autant que possible, et continuons à le faire aujourd’hui encore.

Moins de 24h après l’installation, la police a encerclé le parc et interdit toute entrée dans celui-ci. Après de vaines négociations, les ordres de la préfecture sont tombés : “Vous partez tous ou on contrôle et on arrête les gens”. De nouveau, aucune solution n’a été proposée pour pallier l’urgence de la situation.

Le collectif, à défaut d’avoir pu s’installer, a pu obtenir un rendez-vous avec la préfecture ce lundi 31/07/2023. Rendez-vous auquel nous avons accompagné le porte-parole du collectif, et durant lequel nous avons été reçus par la Directrice adjointe de la DDETS, Céline De Bideran, et la déléguée du Préfet, Noémie Vanherse. Après leur avoir exposé les différentes situations et vulnérabilités, les représentantes de la préfecture nous ont expliqué avoir pour objectif de vouloir fluidifier le dispositif d’hébergement d’urgence. Cependant, encore aujourd’hui, nous avons rencontré une famille avec un bébé de deux mois en demande d’asile et pourtant à la rue. 

La préfecture s’est cachée derrière son criant manque de moyens, et le dilemme entre l’accueil de nouvelles familles vulnérables à protéger et les familles bénéficiant déjà de cet accueil d’urgence, en attente d’une solution plus pérenne. 

Pour la préfecture, il n’est plus question de loi, ni de droit au sens le plus juridique du terme, mais bien de savoir laquelle de ces femmes victimes de violence mérite le plus d’être protégée ? Lequel de ces enfants ne mérite pas l’hôtel, mais plutôt la rue ? Quelle famille n’a pas besoin de protection ? 

 

Crédit photo : Christine Ravier