Avant et au moment du démantèlement du camp de Calais, plus de 300 Centres d’Accueil et d’Orientation (C.A.O.) ont été ouverts en France. Ils hébergent environ 4 000 migrants, pour la plupart demandeurs d’asile, venant du camp de Calais, du centre humanitaire de Paris Nord ou des trottoirs parisiens.

Autour de ces C.A.O., une importante mobilisation citoyenne s’est mise en marche, et des milliers de personnes agissent quotidiennement et bénévolement pour venir en aide aux personnes en exil, que ce soit pour des cours de français, des dons (vêtements, chaussures, produits d’hygiène…), de l’aide au transport, de l’accompagnement juridique ou plus simplement pour partager des moments conviviaux.

Afin de mettre en lumière cette mobilisation citoyenne, une « fête de l’accueil solidaire » est organisée dans certaines régions le dimanche 18 décembre, journée internationale des migrants.

Focus sur le réseau Info CAO

Une grande partie des bénévoles mobilisés pour l’accueil des réfugiés travaille en réseau, notamment sur la page Facebook Info CAO et sur ses déclinaisons régionales. Ce réseau est une initiative des associations L’Auberge des Migrants et Utopia 56. Il réunit plus de 5 400 personnes, organisées en collectifs citoyens ou en associations. Les exilés peuvent aussi se connecter à ce réseau par la page Info CAO Refugees.

Le site Internet www.infocao et le forum www.exils.org sont les autres outils de ce réseau. Les bénévoles travaillent aussi le plus possible avec les associations existantes, locales ou nationales (Cimade, Secours Catholique, Ligue des Droits de l’Homme, etc.) et des réseaux d’avocats et de juristes.

L’objectif est à la fois de contribuer à un meilleur accueil des exilés, de favoriser le vivre ensemble et de veiller au respect de leurs droits. Ce réseau organise une vigilance citoyenne : les bénévoles et les exilés peuvent signaler les carences éventuelles des centres et agir quand les droits des personnes accueillies ne sont pas respectés.

 

La diversité d’horizon des citoyens engagés

Le réseau Info CAO a recensé 259 CAO, 59 CAOMIE (pour mineurs isolés), et 5 CAOFIE (pour femmes isolées), où plus de 155 initiatives locales sont en cours. Les membres de cette plateforme sont répartis dans toutes les régions. Ils viennent de milieux sociaux différents, ont des engagements humanitaires, culturels, sociaux ou politiques divers. Beaucoup sont venus aider dans les camps de Calais ou Grande-Synthe, tandis que d’autres n’avaient jamais rencontré de migrants. Mais tous sont motivés pour venir en aide aux exilés en CAO, à leur échelle. Notre réseau essaie de les réunir dans cette cause commune, tout en leur garantissant leur indépendance, et sans remettre en cause les prérogatives des gestionnaires des C.A.O. et des travailleurs sociaux qui y sont à l’œuvre.

 

Un accueil inégal dans les C.A.O.

L’accueil des exilés en CAO reste inégal en qualité. De nombreux problèmes nous ont été signalés à la fois par des bénévoles sur place, les exilés eux-mêmes, ou bien par les gestionnaires eux-mêmes, qui ne disposent pas des budgets suffisants, et pas toujours des compétences pour assurer l’ensemble des besoins des exilés. Ces problèmes peuvent concerner les conditions matérielles de l’accueil, l’isolement, ou l’insuffisance de l’accompagnement des demandes d’asile.

La charte des gestionnaires de CAO, rédigée par le comité national de suivi des C.A.O., qui réunit l’Etat et les associations, reste vague et donne peu d’orientations et d’exigences en termes d’accueil. Certains besoins ne sont pas ou sont très mal financés (interprètes, accompagnement juridique, transports, besoin en vêtements…) Les activités subsidiaires (apprentissage du français, activités culturelles, sportives…) sont laissées à la bonne volonté des gestionnaires et des bénévoles qui souhaitent s’y associer. L’accès aux soins est très inégal.

 

Une prise en charge insuffisante des mineurs

Concernant les mineurs, leur prise en charge a été précipitée et insuffisante. La Grande-Bretagne vient de cesser les accès légaux au titre du rapprochement familial ou de l’amendement Dubbs, (amendement du nom d’Alf Dubs, député travailliste, qui avait fait voter au parlement britannique un amendement permettant à la Grande-Bretagne d’accueillir les mineurs isolés les plus vulnérables, y compris s’ils n’ont pas de liens familiaux dans le pays) laissant sur le carreau des centaines de mineurs isolés. La plupart des mineurs de 16 ans ne sont pas scolarisés, ce qui va à l’encontre d’une des lois fondamentales de la République Française.

Les procédures de demande d’asile et d’examen de leurs demandes sont plus longues que ce que la loi prévoit. La promesse de Bernard Cazeneuve de ne pas expulser les demandeurs d’asile « dublinés », qui ont laissé leurs empreintes digitales dans un autre pays européen, n’est pas respectée par toutes les préfectures, qui assignent à résidence et tentent d’expulser.

Les gestionnaires de C.A.O. doivent obtenir les ressources suffisantes pour organiser un accueil conforme au droit et au respect des personnes.

Les mineurs doivent être mieux protégés, en les sortant du système dérogatoire des CAO MIE pour les faire rentrer dans le système français de protection de l’enfance.

 

Au-delà des C.A.O., l’insuffisance de l’accueil

Les exilés ne venant pas des camps de Calais et Grande-Synthe, qui commencent une demande d’asile, ne sont pas hébergés : des centaines survivent dans la rue, à Paris, Lille et dans d’autres villes. Le centre humanitaire de Paris Nord ne peut suffire à la demande. Le dispositif d’accueil des primo-arrivant est sous dimensionné.

Les demandeurs d’asile n’ont pas souvent l’assistance nécessaire (informations, interprète, conseil juridique, transport vers la préfecture…) pour effectuer leur démarche correctement. Les inégalités de traitement entre les personnes issues des camps de Calais et Grande-Synthe, et les autres, concernant l’application des accords de Dublin, sont inacceptables.

«Nous avons beaucoup apprécié ce que vous avez fait pour nous. Nous ne vous oublierons jamais. S’il vous plaît, ne nous oubliez pas» (Message écrit par un exilé sur un tableau, au camp de Calais, la veille des premiers départs vers les CAO).