Depuis début décembre, une dizaine de familles à la rue, rencontrées lors des permanences d’Utopia 56 à Paris, ont initié des référés-libertés devant le Tribunal administratif de Paris. Cette action en justice a permis à ces familles d’enfin accéder à un hébergement d’urgence, puisque le juge des référés a enjoint à la préfecture et l’OFII de mettre en place des solutions. Ces décisions de justice sont salutaires au vu des températures négatives des dernières semaines et de la profonde détresse et vulnérabilité de ces familles.

Pourtant, le 14 décembre 2022, la DIHAL a décidé de faire appel pour 5 familles hébergées, en déposant 5 requêtes en appel devant le Conseil d’État. Ce dernier a ainsi annulé le 26 décembre quatre décisions du tribunal administratif. Le Conseil d’État reconnait la saturation du système d’hébergement d’urgence et argue, en se confortant à l’argumentaire de la DIHAL, que ces familles prendrait la place d’autres “encore plus vulnérables”. À noter que la DIHAL ne s’est pas présentée aux audiences. 

Les familles sont composées : d’une mère seule et ses trois enfants de 11, 15 et 17 ans ; d’un couple, dont la femme est enceinte de quelques semaines, et leurs trois enfants de 4, 6 et 7 ans; d’une mère seule avec sa fille de 5 ans ; et d’une mère seule avec ses cinq enfants de 6, 13, 17, 19 et 21 ans, dont un en situation de handicap physique lourd.

Concernant cette dernière famille, la DIHAL souligne dans son argumentaire qu’aucune preuve du handicap de l’enfant n’a été versée au mémoire en défense. L’enfant, contrairement aux représentants de la DIHAL, était présent à l’audience.

Seul pour un couple, dont la femme est enceinte de 8 mois avec leur fille de 1 an, l’appel de la DIHAL a été rejetée.

Pour Me Samy Djemaoun, avocat des familles devant le tribunal administratif de Paris et le Conseil d’État, « la politique du « en même temps » ne fonctionne pas : l’État ne peut pas arguer “zéro enfant à la rue” (tweet d’Olivier Klein, ministre du Logement, le 20 décembre ; engagement du 19 octobre d’Olivier Klein et Charlotte Caubel, secrétaire d’État chargée de la protection de l’enfant) et, en même temps, faire appel pour remettre des enfants dans la rue. »

Les propos d’Olivier Klein sont mensongers. Rien que mardi 27 décembre, les équipes d’Utopia 56 à Paris ont rencontré 34 familles et femmes seules à la rue, dont 28 enfants. Toutes ont contacté le 115 pour accéder à un hébergement d’urgence, en vain.

Utopia 56 rappelle que des dizaines de lits d’hébergement d’urgence réservés aux déplacés ukrainiens restent vides chaque nuit : “L’hébergement d’urgence n’est pas une question de capacité, mais de volonté. La preuve par l’Ukraine. On doit y mettre tous les moyens quoi qu’il en coute.” Yann Manzi, délégué général d’Utopia 56.

L’État ayant fait à nouveau appel pour 2 familles à la rue à qui le tribunal administratif a permis d’accéder à un hébergement d’urgence, de nouvelles audiences ont lieu mercredi 3 janvier à 15h au Conseil d’État.