Voilà bientôt 40 jours, depuis samedi 28 mai, qu’Utopia 56 a installé un campement revendicatif sur la place de la Bastille avec une soixantaine de jeunes en recours de minorité. Ce campement est une démonstration de solidarité au quotidien et l’implication citoyenne y est constante. 

Cependant, malgré une rencontre avec les responsables de la mairie de Paris et plusieurs demandes auprès de Charlotte Caubel, secrétaire d’Etat à l’enfance, à ce jour la seule réponse concrète des autorités a été une tentative d’entrave de notre action par le ministère de l’Intérieur, tentant, sous couvert de respect de la dignité des personnes, de mettre un terme à notre occupation revendicative. 

Depuis 39 jours, Utopia 56 tente d’interpeller les responsables politiques afin de faire valoir les droits de ces jeunes et mettre fin à l’errance qui leur est imposée par les pouvoirs publics.

Côté gouvernement, Charlotte Caubel, secrétaire d’Etat à la protection de l’enfance, n’a répondu à aucune de nos demandes de rendez-vous. Ce qui est d’autant plus surprenant que le 19 juin, Elisabeth Borne, dont dépend directement le secrétariat, annonçait vouloir « œuvrer dans le dialogue, à l’écoute des Françaises et des Français et de toutes les forces vives”. 

Une lettre ouverte co-signée par 5 député.es alertant sur la situation des jeunes en recours et plus spécifiquement des jeunes présents place de la Bastille lui a été adressée le 1er juillet.

Côté mairie de Paris, le 8 juin, une rencontre avec Dominique Versini, adjointe en charge des droits de l’enfant et de la protection de l’enfance, Ian Brossat, et Léa Filoche, adjoint·es à la Mairie de Paris également, n’a débouché sur aucune décision concrète à ce jour, renvoyant plutôt la responsabilité d’hébergement de ces jeunes à l’Etat. Pour autant, la situation particulière des mineurs en recours ne peut pas permettre à la mairie de Paris de se décharger de toute responsabilité et de tout défausser sur l’État. En effet, leur situation de rue est directement liée aux défaillances structurelles relatives au dispositif d’évaluation géré par le conseil départemental et donc la Mairie de Paris. 

Depuis l’installation du campement, 8 jeunes sur les 60 ont été reconnus mineurs après avoir été refusés par les dispositifs de reconnaissance de minorité. Tous les 8 ont passé plusieurs mois à la rue, sans aucune autre ressource que celle des associations citoyennes.

Parmi les jeunes accompagnés par Utopia 56 à Paris en 2021, environ 65% d’entre eux ont finalement été reconnu.es mineur.es par les juges pour enfants.

En refusant d’ouvrir le dialogue et d’entamer une remise en question structurelle sur l’accompagnement des jeunes en recours à Paris et dans toute la France, la mairie de Paris et le gouvernement continuent de condamner à l’errance des mineurs, déjà abîmés par leur parcours migratoire particulièrement traumatique.

Face à l’absence de réponses, ce campement n’a d’autre possibilité que de perdurer. Utopia 56 reste mobilisée avec les jeunes jusqu’à ce que des solutions concrètes soient apportées et que les pouvoirs publics s’engagent à créer un dispositif d’hébergement et d’accompagnement dédié aux jeunes en recours.

L’errance des mineurs isolés en France 

Les mineurs isolés arrivés en France sans leurs parents doivent passer par des dispositifs d’évaluation de minorité. Ceux que ces dispositifs ne reconnaissent pas comme mineurs à la suite d’une évaluation souvent dysfonctionnelle et faite à charge, sont remis à la rue. Comme de nombreuses associations à travers la France, Utopia 56 est quotidiennement mobilisée afin de leur venir en aide pour initier une procédure de recours de minorité devant le juge des enfants. Lors de ces recours, pouvant durer de 6 à 18 mois, aucun dispositif officiel n’étant mis en place par les pouvoirs publics, ces jeunes sont laissés sans accès à l’hébergement, aux soins, ni à l’école et ainsi abandonnés à eux-mêmes et à la violence de la rue.