Plus de 300 enfants seul·es (MNA), de 13 à 17 ans, vivent actuellement à la rue dans la ville de Calais, à la frontière franco-britannique. Rien qu’au mois de juin, les équipes d’Utopia 56 de Calais ont enregistré 101 mineur·es isolé·es (dont 2 jeunes filles érythréennes de 16 ans) à qui une mise à l’abri a été refusée par les pouvoirs publics. Ce nombre en hausse s’explique notamment par la réouverture des frontières intra-européennes et des conditions météorologiques plus clémentes.

Chaque nuit, nous observons les mêmes refus d’accès au droit : les équipes de bénévoles accompagnent les mineur·es isolé·es qui le souhaitent au commissariat de Calais afin de pouvoir être pris en charge par l’Aide sociale à l’enfance, car ces jeunes sont des enfants en danger avant d’être des migrants. C’est le foyer de Saint-Omer, comptant une quarantaine de places, qui est ensuite chargé d’accueillir et d’accompagner ces enfants.

Ce que nous observons, au mépris de la loi : l’âge des jeunes est d’abord estimé au faciès par la police, qui n’est pas autorisée à le faire. Pour celles et ceux considéré·es comme ayant moins de 18 ans et si le foyer de Saint-Omer a de la place, ces jeunes doivent attendre à l’extérieur du commissariat (de nuit, pendant des heures, peu importe les conditions météorologiques).

Une seule exception : le 10 juin 2021, les jeunes ont pu patienter à l’intérieur du commissariat. En effet, ce jour-là des députés, membres de l’enquête parlementaire sur l’accueil des personnes exilées en France, suivaient la maraude d’Utopia 56. Preuve que le commissariat a connaissance de l’indignité de ses procédures habituelles.

Que ces jeunes aient pour objectif ou non de rejoindre l’Angleterre, le manque de place, d’accompagnement et de moyens contribuent quotidiennement à leur mise en danger et à l’alimentation des réseaux de passage et de traite des êtres humains.

Ceux qui n’ont pas pu être orienté·es vers le foyer de Saint-Omer se retrouvent dans des campements de tentes, expulsés quasi-quotidiennement par la préfecture. Leur matériel (tentes, couvertures données par nos associations ; effets personnels) y est confisqué, laissant ces personnes dormir à même le sol, sans aucune protection.

En laissant des enfants à la rue, la France se met en infraction de la convention internationale des droits de l’enfant dont elle est signataire.

“Une fois de plus à la frontière, la volonté de répression l’emporte sur le devoir de protection.” Pierre Roques, coordinateur Utopia 56 Calais.