Cette nuit, le seuil des 20 000 personnes exilées arrivées en Angleterre en 2024, à bord d’embarcations de fortune, a de nouveau été franchi, à la même date que l’année dernière. Pourtant, la préfecture de la région Hauts-de-France avait annoncé un renforcement significatif des mesures de sécurité sur le littoral afin de réduire ce chiffre : “ cet été […] plus de 1 000 policiers et gendarmes seront déployés pour lutter contre l’immigration illégale et clandestine”.


Malgré l’effective augmentation de la présence policière,
financé en grande partie par le gouvernement anglais, ainsi que l’usage accru de technologies de surveillance, le nombre de traversées de la Manche n’a pas diminué. En revanche, ces mesures ont eu un impact bien réel : elles ont contraint les personnes exilées à prendre davantage de risques pour rejoindre le Royaume-Uni, entraînant ainsi une hausse des incidents mortels.

Ces risques se manifestent de deux façons principales :

  • l’éloignement des points de départ, pour éviter d’être empêchés par la gendarmerie ou la police. À titre d’exemple, le 2 mai 2024, 66 personnes ont été secourues au large de Dieppe, à 134 km du port de Douvres, soit plus du triple de la distance entre Calais et les côtes anglaises.

  • l’augmentation du nombre de personnes par embarcation : d’une année à l’autre et sur la période de janvier à août, la moyenne de passagers est passée de 45 en 2023, à 51 en 2024, atteignant des pics à plus de 80 personnes par bateau.


Dans la crainte d’une intervention policière, les personnes partent dans la précipitation
, sur des embarcations partiellement montées : les boudins, parfois mal gonflés, peuvent se percer, le plancher n’est pas toujours installé, etc. En résulte une augmentation de 39 % du nombre de personnes secourues en mer par rapport à l’année dernière, soit plus de 3261 personnes entre janvier et août 2024.

Durant ces mêmes mois de juillet et août 2024, période marquée par une présence policière accrue, cinq incidents mortels en mer ont été recensés, entraînant la mort d’au moins neuf personnes. Cela porte à 11 le nombre d’incidents mortels répertoriés depuis le début de l’année, contre un seul de janvier à août 2023.

Face à cette situation alarmante, Utopia 56 alerte sur l’urgence à repenser les stratégies répressives actuelles et de privilégier des solutions humaines et durables. L’établissement de voies de passage sûres pour les personnes en situation d’exil est indispensable, la répression accrue ne fait qu’augmenter les risques et le nombre de victimes. Il est temps de mettre en œuvre des alternatives respectueuses des droits et de la dignité humaine.