Madame, Monsieur, 

Dans la nuit du 16 novembre 2023, un groupe de personnes exilées appellent le 112 alors qu’ils sont en mer et sont assez rapidement secourus et ramenés au port de Calais. Ils auraient été rhabillés en partie (nous pensons donc qu’ils ont vu la Protection Civile) mais aucune mise à l’abri n’a été proposée (et ce malgré la présence de familles). Ils sont rapidement remis dehors et contraints de repartir à pied en pleine nuit. 

Notre équipe est d’abord contactée à 00h20 par un groupe de 70 personnes se situant rue des Huttes. Les personnes indiquent avoir été secourues en mer, rhabillées puis remises à la rue. Elles nous demandent du soutien et une solution de mise à l’abri ou de matériel. Lorsque l’équipe arrive sur place, le groupe s’est séparé et a quitté les lieux. 

À 00h27, 15 personnes de ce groupe de naufragés contactent l’une de nos équipes de bénévoles, demandant de l’aide disant qu’elles sont maintenant sur l’autoroute, sont perdues, fatiguées et ont faim. Les bénévoles leur conseillent de quitter l’autoroute au plus vite et de marcher de l’autre côté de la rambarde de sécurité.

À 00h31, les personnes nous rappellent, paniquées. Il y a eu un accident, ils demandent d’appeler une ambulance en urgence. Les bénévoles préviennent les secours vers 00h35. En arrivant sur place aux alentours de 00h40, l’équipe de bénévoles fait constat de l’urgence de la situation et rappelle les pompiers afin qu’ils adaptent leur intervention. 

Un véhicule a foncé dans le groupe. Deux personnes sont décédées, quatre sont emmenées à l’hôpital dont certaines dans des états graves.

 Cela fait des années que nous demandons des dispositifs systématiques de prise en charge comprenant une vraie proposition de mise à l’abri post-naufrage et après une tentative échouée ; des années que nous contactons les services d’Etat pour essayer de déclencher des prises en charge, la plupart du temps c’est un échec ; des années que nous voyons que les personnes sont abandonnées une fois ramenées au Port : pas de mise à l’abri, pas de suivi psychologique, peu de prise en charge soin/hôpital, aucun professionnels de la protection de l’enfance sur place…

Sans protocoles clairement expliqués aux différents représentants de l’Etat qui interviennent sur le terrain (associations mandatées, police, pompier…), et systématiquement appliqués, d’autres drames se produiront.

Cette fois-ci, 15 personnes ont été fauchées sur l’autoroute, mais ce sont des centaines d’autres que nous croisons la nuit en plein hiver, risquant l’hypothermie ou d’autres accidents.

 La mer est trop dangereuse, la terre le devient.

Nous continuerons d’alerter sur la responsabilité du gouvernement français dans ces situations et sur les risques de la non prise en charge. 

Les équipes d’Utopia 56.